Naïo Technologies en redressement judiciaire : le pionnier des robots agricoles cherche son second souffle

Basée près de Toulouse, la PME Naïo Technologies a été placée en redressement judiciaire début juin. Malgré une ascension fulgurante, des robots vedettes et des millions levés, la start-up emblématique de l’agriculture autonome tente aujourd’hui de survivre. Un symbole fort pour toute la filière AgriTech en Occitanie.


À Escalquens, aux portes de Toulouse, les robots de Naïo Technologies continuent d’arpenter les champs. Mais depuis le 5 juin dernier, l’entreprise qui les conçoit marche sur un fil. Placée en redressement judiciaire, la pionnière de la robotique agricole vit l’une des périodes les plus critiques de son histoire.

Naïo Technologies, fondée en 2011 par deux ingénieurs en robotique, Gaëtan Séverac et Aymeric Barthes, s’est fait connaître avec Oz, un petit automate capable de désherber des parcelles en toute autonomie et d’envoyer un SMS une fois le travail accompli. Le succès est immédiat. Les maraîchers bio s’enthousiasment, les investisseurs suivent. Entre 2015 et 2022, les levées de fonds s’enchaînent : 3, puis 14, puis 32 millions d’euros.

La famille de robots s’agrandit. Dino pour les légumes, Ted pour les vignes (capable d’enjamber les rangs), Orio pour les grandes cultures. L’aventure industrielle décolle. Plus de 450 machines seront fabriquées, exportées dans une vingtaine de pays, des États-Unis à l’Espagne. En 2020, le Financial Times classe Naïo parmi les 100 entreprises les plus performantes d’Europe. En 2024, la revue Le Vin de France sacre le robot Ted « Innovation environnementale de l’année ». En 2019, Dino entre même dans les sujets du bac.

Mais le conte agricole s’est heurté à la réalité économique. Depuis trois ans, le chiffre d’affaires s’est contracté de façon brutale, passant de près de 4 millions d’euros en 2021 à 2,4 millions fin 2024. La direction, restée discrète sur les causes précises de cette chute, a expliqué avoir engagé la procédure pour « permettre la recherche d’un repreneur ». Des négociations sont en cours.

Le coup est dur pour les 48 salariés de la PME, emblème de l’agriTech made in Occitanie. Il survient aussi dans un contexte plus large de ralentissement de la tech régionale. L’INSEE, dans son rapport de juin 2025, fait état d’une baisse des investissements dans les start-ups, sur fond d’incertitudes économiques persistantes.

Malgré ces vents contraires, certaines initiatives de Naïo conservent leur cap. Le World FIRA, forum international de la robotique agricole lancé en 2016 par l’entreprise, n’est pas menacé. Désormais porté par une association indépendante depuis 2019, le salon d’Auzeville-Tolosane reste un rendez-vous majeur pour les professionnels du secteur, avec des démonstrations de robots en conditions réelles.

Et les robots, eux, ne sont pas encore rangés au hangar. Ted est attendu le 17 juillet prochain à Peyrolle, dans le Tarn, pour le salon viticole « Vini Vini Vici ». À défaut de certitudes sur l’avenir de l’entreprise, l’esprit de Naïo continue, littéralement, à tracer son sillon.