Nubbo : un quart de siècle à faire mentir les prophètes de l’éphémère

Dans le grand cirque des start-ups, où l’éclat passager tient souvent lieu de succès, Nubbo célèbre ses 25 ans avec la sereine assurance d’un bâtisseur qui mise sur le solide plutôt que le spectaculaire. Le 6 mars dernier, l’incubateur occitan a soufflé ses bougies dans son fief de La Cité, non pas avec des promesses de lendemains qui chantent, mais avec un bilan qui tient debout tout seul : 373 projets accompagnés, 1,2 milliard d’euros levés – un chiffre qui fait hausser les sourcils, avouons-le – et 83 % de survie à cinq ans. Preuve que sous la tente, ce sont les fondations qui comptent.

Ici, pas de mirages ni de promesses gonflées d’illusions. Nubbo impose une vérité que beaucoup ont oubliée dans la fièvre des pitchs : une entreprise, ça sert un besoin, pas un ego. « Ces dernières années nous avons eu à éduquer toute une génération d’entrepreneurs qui pensaient qu’il suffisait de savoir coder pour monter une start-up », lâche Anne-Laure Charbonnier, la directrice, avec ce mélange de fermeté et de lassitude qui trahit des années passées à trier le grain de l’ivraie. Exit les génies autoproclamés qui confondent une idée avec un business plan. À Nubbo, on préfère les besogneux aux flamboyants : engagement total des fondateurs, focus B2B, et une obsession pour la viabilité qui frôle le sacerdoce.

La science au service du concret

L’incubateur tire sa force d’un alliage rare : 67 % de ses projets naissent dans les labos de la recherche publique, là où les concepts prennent racine avant de devenir des réalités. Micropep rêvait d’une agriculture sans pesticides, Ascendance d’un ciel hybride avec son avion Atea. Ce n’étaient pas des gadgets pour hipsters en quête de buzz, mais des paris sur l’avenir, portés par une ambition qui se passait de tape-à-l’œil. En un quart de siècle, Nubbo a semé 11 millions d’euros et récolté 3 470 emplois, tous ou presque restés en Occitanie. Une fidélité territoriale qui dit quelque chose de notre époque : on peut innover sans courir à San Francisco.

Son modèle financier, lui, repose sur une logique d’une simplicité redoutable : mi-public, mi-autofinancé. Les start-ups remboursent l’aide une fois lancées, alimentant un cycle où l’argent public ne s’évapore pas dans des bilans déficitaires. Avec 1,5 million d’euros par an, Nubbo prouve qu’on peut bâtir grand sans dilapider. « Notre approche reflète exactement ce que nous conseillons aux entrepreneurs : innover, s’adapter aux réalités du marché, mobiliser efficacement les compétences », glisse Guillaume Costecalde, président de l’incubateur.

Et demain ?

Pour 2025, Nubbo pousse ses pions : 35 projets dans la besace, 1,75 million de budget, et une deeptech qui sème encore plus loin. À Toulouse, les briques s’empilent avec méthode, et c’est là-dedans – ce rejet têtu du clinquant pour le concret – que Nubbo signe son quart de siècle et plus.


Sur la photo : Guillaume Costecalde et Anne-Laure Charbonnier, les architectes de Nubbo, flanqués de Paul Malbert (Anyos) et Raphaël Blanc (JurIA), deux poulains de l’incubateur venus prouver que la rigueur paie (©Clément Seilhan).