En partenariat avec Touléco
En pleine montée en puissance, l’institut toulousain en intelligence artificielle Aniti table sur ses recrutements de chercheurs de pointe pour se faire une place à l’international.
À la traîne derrière les États-Unis et la Chine, comment la France peut-elle espérer rejoindre le top 5 mondial des pays leaders en intelligence artificielle (IA) ? Le plan Villani en faveur de l’IA y répond notamment par la mise en place dans l’Hexagone de quatre instituts interdisciplinaires d’intelligence artificielle pour une durée de 4 ans renouvelable. L’institut toulousain Aniti* en fait partie aux côtés de Grenoble, Nice et Paris. Labellisé fin avril dernier et doté de 100 millions d’euros d’argent public, il est en phase de structuration.
Après la nomination début juillet de son directeur opérationnel, Nicolas Viallet, c’est au tour de prestigieux chercheurs de rejoindre l’institut. « Vingt-quatre chaires ou groupes de recherche sont déjà en place réunissant 75 chercheurs opérationnels. Dans un an, nous devrions compter 200 chercheurs », souligne Nicolas Viallet. Les candidats sont proposés à un jury international mandaté par l’État qui juge de l’excellence du projet scientifique présenté. Mais certains recrutements de pointures sont plus médiatiques que d’autres.
César Hidalgo, chercheur star de l’IA
Le Chilien César Hidalgo, arrivé en septembre, fait sensation. À 39 ans, primé de nombreuses fois pour ses travaux de recherche sur des plateformes de visualisation de masses de données, il est aussi connu pour ses positions volontiers provocatrices. Lors d’une conférence TED, il a présenté son idée de « démocratie augmentée ». Pour rectifier notre système politique déficient et encourager une démocratie directe sans représentant, il suggère que chaque citoyen crée son avatar informatique personnalisé qui le représenterait et participerait aux décisions démocratiques.
Le chercheur partage encore son temps entre son laboratoire Media Lab du MIT à Boston, sa start-up Datawheel et Toulouse. Il s’installera à temps plein dans la Ville rose dans un an. Ses travaux porteront sur les notions de biais dans les données et d’acceptabilité sociale. « Le projet Aniti l’a séduit par l’interdisciplinarité possible, notamment avec des chercheurs en économie de la TSE, les échanges avec le tissu de PME et de grosses entreprises de la région mais aussi la dimension éthique et morale que l’on met dans l’IA ici », relève Nicolas Viallet. Des atouts précieux alors que les salaires en France ne peuvent s’aligner sur ceux pratiqués outre-Atlantique en recherche.
Des recrutements pointus à l’international
Nouveau venu dès le printemps 2020, l’Israëlien Marc Teboulle, encore professeur à l’Université de Tel-Aviv, travaillera sur les fondements théoriques et mathématiques de l’IA. Céline Castets-Renard, professeure de droit à l’université d’Ottawa mais aussi à UT1 Capitole, rejoint également les équipes d’Aniti. La juriste française est spécialisée dans la recherche sur la régulation du monde numérique, notamment la protection des données personnelles issues d’objets connectés.
Le docteur en neurosciences Thomas Serre, actuellement en poste à la Brown University aux États-Unis, se consacrera à la compréhension des processus d’apprentissage, en particulier visuels, au niveau du cerveau. L’idée est de pouvoir les reproduire dans des algorithmes plus fiables de reconnaissance d’images. Enfin, le Portugais Joao Marquez-Silva a déjà débuté ses travaux depuis début juillet sur des notions théoriques de l’IA. Plusieurs chercheurs toulousains du CNRS rejoignent aussi Aniti. « Ce premier casting devrait permettre de braquer les projecteurs sur le projet et d’attirer d’autres talents mondiaux par effet d’entraînement », espère Nicolas Viallet.
Isabelle Meijers, Touléco
*Aniti (Artificial and Natural Intelligence Toulouse Institute)