Recherche. Allo Orion ? Ici la Terre !

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ToulÉco

Coresponsable d’une équipe internationale de 150 personnes, l’astrophysicien Olivier Berné est en charge d’un programme « Early Release Science » sur le télescope spatial infrarouge James Webb. Il tente de percer les secrets de la formation des systèmes planétaires. Rencontre.

Le télescope James Webb n’en finit pas de nous envoyer des images qui bouleversent notre compréhension du monde et de l’univers. « Selon mes confrères de la Nasa, aucun programme spatial n’a eu un tel impact médiatique depuis la mission Apollo 11 et les premiers pas sur la Lune », partage Olivier Berné, astrophysicien à l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie de Toulouse (Irap) et directeur de recherche au CNRS. Avec ses collègues de l’Institut d’astrophysique spatiale à Orsay et de l’université d’Ontario au Canada, il est coresponsable de la mission d’observation de la nébuleuse d’Orion avec le télescope JWST.

Cette mission regroupe une équipe de 150 chercheurs issus de dix-sept pays. Cela fait d’Olivier Berné l’un des tous premiers scientifiques à conduire un programme avec l’instrument qui nous montre les secrets les plus lointains de l’univers. « Les images portent un message scientifique important et sensibilisent le grand public au monde de la recherche spatiale », affirme l’astrophysicien, auteur de l’ouvrage qui raconte son aventure Destination Orion : Voyage à bord du télescope James Webb, publié aux éditions Dunod.

Système planétaire en vue

Contempler la nébuleuse d’Orion, située à 1400 années-lumière de la Terre, c’est accéder à une zone où se forment des étoiles. « Nous avons observé le système planétaire naissant « d203-506 » et mesuré le rôle que jouent les étoiles massives dans la formation des systèmes planétaires », explique Olivier Berné, dont l’étude est parue en Une de la revue Science en mars dernier. Si les étoiles massives – plus massives que le Soleil – sont rares et vivent peu de temps, elles sont extrêmement lumineuses, certaines de l’ordre de 100.000 fois plus que le Soleil. « Ces étoiles massives jouent un rôle central dans l’environnement galactique », souligne le chercheur. « Elles ont la capacité de dissiper la matière ; ainsi, dans l’embryon de système planétaire observé, la formation d’une planète gazeuse comme Jupiter paraît impossible. »

L’éternelle question de nos origines

« Observer Orion constitue une manière de remonter dans le passé, par analogie », poursuit Olivier Berné. « Le rayonnement des étoiles massives active une certaine chimie ; et qui dit chimie organique dit potentielles formes de vie », sourit l’astrophysicien, qui avoue que la question est au cœur de tous les plus récents congrès de la discipline.

Sélectionnée dans le cadre d’un nouveau programme d’observation, l’équipe d’Olivier Berné, en collaboration avec des collègues de l’Agence spatiale européenne et de l’université de Leiden, aux Pays-Bas, va changer d’échelle et regarder un échantillon plus large de systèmes planétaires en formation. « Nous allons par exemple étudier l’effet de la distance de ces systèmes par rapport aux étoiles massives », avance-t-il. Les données, qui devraient arriver sur Terre à l’automne prochain pour des publications courant 2025, réserveront quelques surprises et inattendus. Parce que c’est ça, la science.
Valérie Ravinet

Sur les photos : L’astrophysicien Olivier Berné devant l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie – Crédits : Hélène Ressayres-ToulÉco.