En partenariat avec
.
Le fort développement de l’intelligence artificielle ces dernières années renforce les ambitions d’Ekitia, qui veut devenir peu à peu « un service public de la donnée » au niveau national. Son directeur Olivier Auradou fait le point sur l’évolution et les projets de la structure.
Une structure occitane qui se fait entendre à l’échelon international. Ekitia, le pôle éthique d’économie de la donnée, a en effet vu, fin 2023, son président Bertrand Monthubert prendre la coprésidence du groupe de travail sur la gouvernance de la donnée du GPAI [1], organisation mondiale qui travaille sur les enjeux autour de l’intelligence artificielle. « C’est une belle reconnaissance. Le GPAI rassemble les experts d’une vingtaine de pays au sein de trois groupes de travail. L’engagement de Bertrand Monthubert a été tellement apprécié qu’il a emporté une coprésidence. Cette organisation ambitionne de devenir une sorte de Giec [2] de l’IA », explique Olivier Auradou, le directeur d’Ekitia, dont le siège est à La Cité à Toulouse.
Depuis 2019, la structure, qui se nommait auparavant Occitanie Data, a changé d’ampleur. Elle rassemble aujourd’hui soixante-dix adhérents. Aussi bien des collectivités locales (la Région Occitanie, le Conseil départemental de Haute-Garonne, Toulouse Métropole, Nantes Métropole, Bordeaux Métropole, la Région Bretagne, etc.), que des entreprises (La Poste, la SNCF, Orange, Sopra Steria, etc.) ou des centres de recherche (CNRS, Inserm, IRD, Inria, etc.).
L’association de préfiguration qui va enfin, en 2024, devenir officiellement un groupement d’intérêt public (GIP [3]), est composée actuellement de sept collaborateurs salariés et d’un conseiller scientifique bénévole, Michel Petit [4]. Outre le GPAI, Ekitia a des liens avec d’autres organisations internationales comme l’International Data Spaces Association ou Data Spaces, lié à l’Union européenne. En cinq ans, les réalisations sont déjà nombreuses pour Ekitia : une charte éthique de l’usage de la donnée [5], un label éthique pour les solutions numériques ou encore le travail sur l’élaboration d’un espace commun pour le partage sécurisé de la donnée à l’échelle du territoire occitan.
« L’IA, c’est la révolution technologique qui s’est diffusée le plus vite »
L’explosion en 2022 de l’IA générative a fait prendre conscience au grand public du bouleversement qu’allait induire l’intelligence artificielle dans nos vies. Et confirmé l’importance du travail mené au sein de l’association occitane. « L’arrivée de logiciels type ChatGPT a mis en visibilité les sujets que nous portons depuis des années sur l’usage éthique de la donnée, puisque l’IA consomme un nombre incalculable de ses données. L’intelligence artificielle, c’est la révolution technologique qui s’est diffusée le plus vite. Transition écologique, consommation énergétique, mobilité, santé… L’IA aura un impact dans tous ces domaines. Et cela pose une question de souveraineté. Si on laisse l’IA seulement aux mains d’entreprises américaines, ce sont elles qui vont piloter l’économie mondiale et qui vont influer sur l’évolution des modèles démocratiques », décrypte Olivier Auradou.
L’intelligence artificielle, très énergivore, a un impact environnemental important, une problématique sur laquelle Ekitia travaille également. « Sur l’aspect écologique, l’IA est à la fois un problème et une solution. Si vous voulez faire mieux en matière de transition, il y a besoin d’analyser beaucoup de données, ce que fait très bien l’intelligence artificielle. Mais cela nécessite de stocker un nombre important de données dans des data centers. En fait, il faut écarter l’usage de l’IA à chaque fois que ce n’est pas utile. Il faut partir sur un principe de minimisation de cette technologie », estime le directeur d’Ekitia.
En 2024, les priorités pour Ekitia vont être de « continuer à faire grossir le nombre d’adhérents pour s’imposer progressivement comme un service public de la donnée au niveau national », de « développer l’offre de formation » de l’organisation, de « réaliser quelques embauches pour mieux travailler sur des appels à projets » et de « créer plus d’événements en présentiel avec les membres » (séminaires, déjeuners, etc.).
Matthias Hardoy
Sur la photo : L’équipe d’Ekitia. De haut en bas, de gauche à droite : Agathe Granier, cheffe de projet data collaboratif, Pauline Zordan, juriste, cheffe de projet gouvernance des données, Lisa Feriol, doctorante gouvernance de la donnée, Anthéa Serafin, référente en éthique des usages des données et de l’IA, Olivier Auradou, le directeur d’Ekitia, et Inès Mouysset, brand manager. Crédit : Ekitia. // Bertrand Monthubert, président d’Ekitia. Crédit : Rémy Gabalda – ToulÉco.
Notes
[1] Global Partnership on AI (partenariat mondial sur l’IA).
[2] Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat dont on parle très souvent dans l’actualité.
[3] Ce statut beaucoup plus contrôlé que le statut associatif permet « à des partenaires publics et privés de mettre en commun des moyens pour la mise en œuvre de missions d’intérêt général ». C’est un label de sérieux rassurant pour les membres qui adhèrent à l’organisation.
[4] Une collaboratrice est à Paris, le conseiller scientifique à Montpellier, le reste de l’équipe à Toulouse.
[5] Parmi les multiples enjeux éthiques, on peut noter, par exemple, la lutte contre les biais racistes ou sexistes de intelligence artificielle. L’IA est en effet majoritairement développée par le même profil de personnes (homme blanc de la Silicon Valley ayant un certain nombre de stéréotypes pouvant influer sur l’IA).